Je ne suis pas féministe ! [Mais...]
lundi 8 mars 2004 | par Leirn
http://chiennesdegarde.org/article.php3?id_article=298
C’est
un peu un blog anniversaire que j’avais envie de faire. J’ai écrit ce
texte autour d’un 8 mars 2001... C’était mon premier "8 mars". L’ancien
forum existait depuis 2 mois environ. J’avais envie de reprendre ce
texte et de le laisser traîner, dans une forme un peu plus travailée,
sur ce forum-là aussi. Pour la petite histoire, sachez que certain-e-s
l’ont pris au 1er degré. Alors, au cas où vous en doutiez : je suis
bien féministe !
« Je ne suis pas féministe, mais je pense que les hommes et les femmes sont égaux.
Je ne suis pas féministe, mais je n’ai pas besoin de vivre sous la dépendance d’un homme.
Je ne suis pas féministe, mais je sais bien que ce sont d’abord les femmes qu’on viole.
Je ne suis pas féministe, mais je trouve inadmissible de me faire traiter de salope dans le métro.
Je ne suis pas féministe mais je pense que c’est anormal que les femmes gagnent moins que les hommes à travail égal.
Je ne suis pas féministe, mais je ne veux pas être traitée comme un objet de plaisir.
Je ne suis pas féministe, mais... »
Alors, c’est quoi, ’Etre féministe’ ?
Vous
qui n’êtes pas féministes, prenez le métro, le bus, allez dans les
supermarchés et regardez autour de vous : une femme sur dix vit la
violence conjugale, sans distinction de milieu social, parce que
contrairement à ce qu’on croit, ce n’est pas un truc de pauvre. Vous
êtes combien dans une rame de métro ? Dans une file à la caisse ?
Regardez
à travers le grillage d’une cours de récréation. Au moins une petite
fille sur six sera victime d’agression sexuelle. Lesquelles ?
Laquelle
de ces petites filles sera virée en revenant de congé de maternité ?
Laquelle sera obligée de supporter le harcèlement continuel et les
plaisanteries grasses de son patron pour pouvoir ramener un salaire à
la maison ?
Parmi ces petits garçons qui jouent au toboggan, qui
empilent du sable ou qui courent, lequel trouvera un jour viril de
participer à un viol collectif ? Lequel va un jour frapper sa femme en
pensant qu’il la corrige pour son bien ?
Peut-être pensez-vous
que ces petits garçons sont intrinsèquement des brutes et ces petites
filles, intrinsèquement des victimes. Par conséquent, l’un et l’autre
mérite bien leur sort. Ca ne peut pas vous arriver à vous, ni à vos
enfants, ni à votre compagnon ou compagne, ni à vos parents, ni à vos
sœurs, ni à vos amis, ni...
Finalement, ça n’arrive probablement à personne.
Et
un jour, on la retrouve en larme, l’œil au beurre noir. Elle explique
qu’elle est tombée dans l’escalier. Et un jour, on la retrouve
enceinte, elle ne sait pas de qui, et d’ailleurs, elle ne veut pas en
parler... mais elle pleure soudain sans raison et ne peut plus sortir
de chez elle. Et un jour, on la retrouve qui donne des coups de poings
dans les murs, parce qu’on lui a dit encore une fois qu’elle n’aurait
pas la promotion attendue, qu’elle a trop de travail avec ses enfants
et que c’est quand même un métier d’homme.
Et bien sûr, c’est
sans rapport avec tel message publicitaire qui incite au viol, c’est
sans rapport avec des déclarations fracassantes d’hommes publics qui
pensent que les femmes publiques sont nécessairement des putes, c’est
sans rapport avec ces parents qui ont toujours préféré leur fils, parce
que un fils, quand même, c’est important.
C’est sûrement sans rapport...
«
C’est sans rapport, n’est-ce pas ? Dites, rassurez-moi... Je ne vis pas
dans une société sexiste, hein ? Je n’y vis pas depuis vingt ans...
trente ans sans m’en être rendu compte ? Je ne le supporterais pas. »